Trois jours d’attente HermineHermineHermineHermine

Ravey nous ravit.
Certes c’est fastoche, mais tellement vrai !!


Trois jours d’attente

Nous lisons Yves Ravey depuis Le drap, c’était au tout début de ce siècle. Il nous avait marqué avec ce désossé littéraire d’un qui écrit comme on dégraisse. Il évoquait la mort de son père. Depuis, nous attendons son dernier opus avec impatience et s’il a changé longtemps de style à chaque livraison, c’est désormais dans un genre qu’il excelle et se complait ! Pour ne pas nous déplaire.

Ravey est devenu l’auteur du suspense. Dans Trois jours chez ma tante, qui sort ces jours-ci, nous défions un lecteur de poser son livre à mi-parcours ! Plus court et musclé qu’un Hitchcock, aussi vif qu’un oiseau des Oiseaux, son livre nous traverse. L’art est clinique, l’œil qui lit un palpitant ! Ravey pousse le lecteur à lire, non à dévorer d’impatience, notre seule limite étant physique, celle de l’œil qui trace et des neurones qui bloquent.

La fabrique de Ravey nous prépare à la surprise sans qu’on n’y soit jamais préparé. Il nous embarque, nous sommes embarqués, sans qu’évidemment on en sache ni l’heure ni la page de ce qui nous a embarqués. On sent plus qu’on sait qu’il y aura dans le livre une bascule, un soupçon qui gagne, une arrière-pensée qui s’installe, un vague doute, de moins en moins vague, carrément sans aucun doute. Le héros annoncé, assez standard, quasi normal, comme nous quoi, s’avère son double. Comme nous quoi ! Les hommes de Ravey sont des hommes, peu d’héroïne féminine en jeu, plutôt des agents doubles d’eux-mêmes. Ravey est à même l’âme des OSS 117 de l’ordinaire, des gars sans envergure, trafiquants d’eux-mêmes ou autres menteurs de soi. Ils sont assez courants ceux qui se fuient en fuyant, se barrent dans les confins ou, plus exceptionnels, écrivent des lettres avec des ciseaux et des lettres découpées dans les magazines pornos.

Héros sans vergogne dont le vernis affectif aveugle. On est chez Yves Ravey toujours en terre trouble alors que ni la main qui tient le stylo ni rien ne tremble.

Yves Ravey est dans la rentrée littéraire. Auteur discret, le contraire de la dame  au chapeau que les médias excitent. Ravey nous ravit aussi car tapi dans la pénombre avec une écriture au scalpel, des rythmes qui nous font prévenir le lecteur cardiaque qu’il doit lire sous une couette, Trinitine à portée de main.



Trois jours chez ma tante d’Yves Ravey aux éditions de Minuit, 192 pages, 15€

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Edito

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