L’association BZH New York souffle ses dix bougies aujourd’hui, samedi 9 septembre 2017. L’occasion de rendre hommage à ceux qui ont jeté des ponts au-dessus de l’océan depuis des générations. L’occasion aussi de faire la fête. Pique-nique et concerts attendent les Bretons et leurs amis durant tout le week-end. Le directeur des Vieilles Charrues, Jérôme Tréhorel, est même de la partie.


Cette histoire, tout le monde la connaît mais racontons-là encore une fois, rien que pour le plaisir et pour la mémoire. Il s’appelait Nicolas Legrand… Tailleur de son état, avec deux amis, Job Daouphars et Loeiz Bourhis, il décide en 1881 de quitter Roudouallec, petite commune du centre de Bretagne pour partir en Amérique. « En septembre 1877, je revins à Roudouallec. Bientôt marié, puis père de deux enfants, je vivais misérablement d’un salaire quotidien de 12 sous, écrit le Breton né en 1852. Résolu à tenter ma chance, je partis avec deux amis. Dans le Connecticut, je gagnais 20 francs par jour, salaire énorme comparé aux 12 sous que je gagnais en France. »

« Tout le monde venait me voir »

« Lorsqu’à Roudouallec, ma femme reçut son premier mandat d’Amérique, 100 pièces de cent sous, il y eut bien des envieux, raconte-t-il encore. À l’époque, un premier domestique de ferme gagnait à peine 150 francs par an. Au bout de quatre ans, ayant gagné un bon pécule, je décidais de rentrer. Lorsque je revins au pays, en 1884, ce fut un événement. Tout le monde venait me voir et la maison ne désemplissait pas. On venait même de Gourin, de Guiscriff et de Leuhan pour entendre parler de l’Amérique… »

L’un des pionniers de l’immigration bretonne vers les Etats-Unis fera tellement « d’envieux » qu’il entraînera pas moins de 55 000 de ses compatriotes dans son sillage tous désireux comme lui d’échapper à la pauvreté et tenter leur chance.

L’esprit de Nicolas Legrand toujours intact

Cent trente-six ans sont passés. Bien sûr, les choses ont changé. La vie n’est plus la même. Internet et l’avion ont remplacé le bateau et ses lettres qui pouvaient ne jamais arriver, ce père, cette mère restés derrière qu’on ne reverrait peut-être pas de sitôt. Le téléphone a raccourci les distances mais allez savoir pourquoi, l’esprit de Nicolas Legrand flotte toujours là quelque part, intact, entre le nouveau monde et ce coin de Bretagne qu’on a laissé.

Ce précieux passé laissé en héritage, une joyeuse bande de copains fraîchement débarquée à New York décide un jour de 2007 de le ravigoter. Au nom de la transmission et de la continuité, valeurs ô combien chères aux cœurs des Bretons, BZH New York était né. Laurent Corbel arrivé tout droit d’Arradon, Eric Thoby, lui, de Redon lançaient les paris.

Parties de boules à Brian Park

L’association s’attacherait à promouvoir la Bretagne à travers la culture, l’économie, le tourisme et sa langue. Aux commandes du navire pendant sept ans, Charles Kergavarat rentré au pays depuis a cédé sa place à Laurent Corbel, co-président avec Véronique Gautier et Kate Bride, Américaine d’origine irlandaise.

Soudée et unie comme jamais malgré quelques frictions rencontrées par le passé – quelle association n’y a pas droit -, la nouvelle équipe met les bouchées doubles depuis trois ans pour faire honneur à sa région. Du simple apéro-belote hebdomadaire dans un café de Manhattan aux parties de boules à Brian Park, le programme ne manque pas de piquant et d’imagination.

Vieilles Charrues et bagad de Lorient

Concerts, Fest-noz, rencontres littéraires, conférences sur le thème de l’identité sans parler de la Fête de la Bretagne ou encore l’immanquable repas de Noël s’ajoutent à la liste déjà bien chargée des animations.

Ceci pour les petits événements car les Bretons de New York aiment aussi les sensations fortes et ne reculent pas devant l’exploit.

Faire venir les Vieilles Charrues à New York ? Une idée folle qui finira en beauté sur la scène d’été de Central Park. Accueillir en grandes pompes l’American Cup ? Voilà qui sera fait sur la terre ferme de Big Apple et aussi sur l’eau.

Dernier gros succès en date, la venue du bagad de Lorient avec les organisateurs du Festival Interceltique (FIL) le jour de la Saint-Patrick pour défiler, drapeaux en tête, sur la 5eAvenue lors de la Parade.

« Des ponts construits avec la Bretagne »

« Les personnes arrivées avant nous ont construit des ponts avec la Bretagne, avance avec conviction Véronique Gautier, un petit bout de femme arrivée de Chantepie près de Rennes il y a douze ans. Sur ces ponts marchent des gens souvent très talentueux que nous aimons mettre en avant. »

Dix ans viennent de passer, l’heure de poser les bougies sur le gâteau et d’admirer les liens tissés entre le pays de ses racines et ce côté de l’Atlantique. « Les Bretons sont aventureux, curieux et audacieux, décrit avec passion la co-présidente de BZH. Ce sont des explorateurs qui n’hésitent pas à voyager et New York étant une ville très accueillante, ils y trouvent un formidable écho pour s’exprimer et se réaliser. »

« La Baie d’Hudson nous tend les bras »

Professeur de français dans un lycée américain, la Rennaise d’origine admet avec grande modestie « aimer aussi les défis. » « Les New-Yorkais ne sont pas introvertis. Ils sont tout sauf cela, lance affectueusement Véronique. Quel plus bel accueil peut-on attendre d’une telle ville. La Baie d’Hudson nous tend les bras. Et nous, Bretons, sommes réceptifs à cela. De plus, nous sommes travailleurs. On n’hésite pas à donner de sa personne. On sait qu’on peut y arriver. Nous avons cela en nous. C’est l’ancienne génération qui nous a appris cela. Il y a de très belles histoires de réussite au sein de notre communauté. »

Beaucoup sont repartis mais parmi les gens de Gourin, Scaër et Roudouallec, beaucoup sont revenus quand certains n’ont jamais voulu rentrer. « On a besoin de retourner vers les siens et sur ces terres, en attendant, on essaie de construire de belles choses. Nous sommes dans le sillage de ces générations comme dans le sillage du bateau. »

Jérôme Tréhorel de la fête

Un anniversaire étant toujours une bonne occasion de faire la fête, les Bretons de New York célèbreront leurs dix ans durant tout le week-end. Direction tout d’abord Central Park pour le désormais traditionnel « pique-nique Pâtée Hénaff » qui se tiendra ce samedi à partir de 16 heures. L’événement est gratuit et ouvert à toute la famille.

Place ensuite à la musique avec le retour demain soir du Social Celtic Club un an après son concert aux Vieilles Charrues à Central Park. Le groupe composé de musiciens bretons et écossais qui entame sa seconde tournée aux Etats-Unis sur des airs celtiques revisités s’arrêtera au DROM, un club de Manhattan. Egalement de retour après sa prestation new yorkaise de l’an passé, le DJ, Olivier Meiji.

Et pour rappeler d’heureux souvenirs aux organisateurs, le directeur du Festival de Carhaix « himself », Jérôme Tréhorel, sera présent. Il l’avait promis. Ambiance avec crêpes garantie !

De New York,
Marie Le Blé

Pique nique à Central Park   

Celtic Social Club au Drom 

Le pique-nique organisé sous l’égide de la maison Hénaff réunit désormais chaque année à Central Park les fans de la célèbre marque de pâtée. Les bénévoles de BZH invitent leurs 200 membres et plus encore à revenir en prendre une tranche aujourd’hui.

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